Kidney cancer in adults at the University Hospital of Tengandogo: epidemiological, clinical, histopathology and therapeutic aspects
Cancer du rein de l’adulte au Centre Hospitalo-universitaire de Tengandogo : Aspects épidémiologiques, cliniques, histopathologies et thérapeutiques
B. Ouédraogo 1, H. Karama1, T. Hafing1, O. Traoré1, AM. Korgo1, S. Pamba1, A. Ndormadjita1, FA. Kabore2, B. Ouedraogo1, A. Sanou1.
1 Service de chirurgie et spécialités chirurgicales du Centre Hospitalo-universitaire de Tengandogo, Burkina Faso.
2 Service d’urologie-andrologie du Centre Hospitalo-universitaire Yalgado Ouédraogo, Burkina Faso.
DOI: 10.54266/ajo.2.2.50
ABSTRACT
OBJECTIVE: To study the epidemiological, clinical and histopathological aspects of renal cancers at the University Hospital of Tengandogo. MATERIALS AND METHODS: There were a cross-sectional, descriptive and analytical study with retrospective collection over a period of 5 years and 6 months, from January 1st, 2016 to June 30, 2021. RESULTS: We treated 39 patients, 33 patients were included, with an exhaustiveness of 84.6%. The mean age of the patients was 52.6 years ± 11.7. The sex-ratio was 1.06. Eight patients had risk factors. Lumbar pain and hematuria were the most frequent circumstances of discovery. The average consultation time was 8.6 months ± 1.1. The physical examination had objectified a lumbar mass in 17 patients, 9 patients had lumbar contact and the examination was normal in 13 patients. The right kidney was the most affected side with 17 patients. The mean size of the tumor was 12.2 cm ± 2.4. All patients underwent radical nephrectomy. We recorded one death intraoperatively. The histological type was clear cell renal carcinoma in 32 patients. One patient had chromophobe cell renal cell carcinoma. CONCLUSION: Kidney cancer is a rare pathology, it occurs in adults around the age of fifty. Patients consult late and locally advanced and metastasized forms are the most frequent. The histological type is dominated by clear cell renal carcinoma.
KEYWORDS: Cancer; Kidney; Nephrectomy.
RESUME
OBJECTIF : Etudier les aspects épidémiologiques, cliniques et histopathologiques des cancers rénaux au CHU de Tengandogo. MATERIELS ET METHODES : Il s’est agi d’une étude transversale, descriptive et analytique avec collecte rétrospective sur une période de 5 ans 6 mois, allant du 1er Janvier 2016 au 30 Juin 2021. RESULTATS : Nous avons traité 39 patients, 33 patients ont été inclus soit une exhaustivité de 84,6%. L’âge moyen des patients était de 52,6 ans ± 11,7. Le sex-ratio était de 1,06. Huit patients avaient des facteurs de risques. La douleur lombaire et l’hématurie étaient les circonstances de découvertes les plus fréquentes. Le délai moyen de consultation était de 8,6 mois ± 1,1. L’examen physique avait objectivé une masse lombaire chez 17 patients, 9 patients avaient un contact lombaire et l’examen était normal chez 13 patients. Le rein droit était le coté le plus atteint avec 17 patients. La dimension moyenne de la tumeur était de 12,2 cm ± 2,4. Tous les patients ont eu une néphrectomie élargie. Nous avons enregistré un décès en peropératoire. Le type histologique était le carcinome rénal à cellules claires chez 32 patients. Un patient avait un carcinome rénal à cellule chromophobe. CONCLUSION : Le cancer du rein est une pathologie rare, il survient chez l’adulte autour de la cinquantaine. Les patients consultent tardivement et les formes localement avancées et métastasées sont les plus fréquences. Le type histologique est dominé par le carcinome rénal à cellules claires.
MOTS-CLES : Cancer ; Rein ; Néphrectomie.
INTRODUCTION
Le cancer du rein représente 3% des cancers de l’adulte dans le monde, son incidence est en augmentation croissante du fait du vieillissement de la population et de l’amélioration de la performance des techniques d’imagerie (1). Le profil de ce cancer varie significativement d’une région à une autre (2). Son profil clinique a changé dans les pays développés où près de 60% des cas sont maintenant découverts de façon fortuite à un stade précoce (3) alors qu’en 1973 aux Etats-Unis, seuls 13% des cancers du rein étaient découverts fortuitement (3). En Afrique, bien que peu d’études aient été publiées sur ce cancer, son incidence est considérée comme faible (4) et son profil clinique est caractérisé par la prédominance des cancers localement avancés ou métastatiques (5). Au Burkina Faso, la fréquence des cancers du rein au Centre Hospitalo-Universitaire Yalgado Ouédraogo (CHUYO) en 2013 était de 1,5% avec une incidence de 7,2 cas/an (6). Cependant jusqu’à ce jour aucune donnée sur cette pathologie n’est connue au Centre Hospitalo-Universitaire de Tengandogo (CHU-T). Le but de notre travail était d’étudier les aspects épidémiologiques, cliniques, histologiques et thérapeutiques des cancers du rein au CHU-T.
MATERIELS ET METHODES
Il s’est agi d’une étude descriptive et analytique avec collecte rétrospective réalisée dans le service de chirurgie et spécialités chirurgicales du CHU-T. La période d’étude était de 5 ans 6 mois, allant du 1er Janvier 2016 au 30 Juin 2021. L’étude a concerné les patients hospitalisés dans le service pour une tumeur de rein. Nous avons inclus ceux qui avait une confirmation histologique et âgé de plus de 18 ans. Les paramètres étudiés étaient : l’âge, le sexe, les antécédents, les circonstances de découverte, le délai de consultation, les signes généraux, les signes physiques, la NFS, la créatininémie, l’ECBU, l’échographie abdomino-pelvienne, la TDM thoraco-abdomino-pelvienne, l’examen anatomopathologique de la pièce opératoire, le traitement chirurgical, les complications, l’évolution et la survie. L’état général a été évalué selon la classification de l’OMS. Les données ont été saisies et analysées avec le logiciel Epi Info© dans sa version 7.2.1.0. L’étude a été approuvée par le comité d’éthique de l’hôpital.
RESULTATS
Au cours de la période d’étude, nous avons traité 39 patients, 33 ont été inclus soit une exhaustivité de 84,6%. L’incidence moyenne annuelle était de 5,9 patients. Des pics ont été notés en 2018 et 2019 avec 18 nouveaux cas diagnostiqués. L’âge moyen des patients était de 52,6 ans ± 11,7 avec des extrêmes de 35 et 80 ans. Le sex-ratio était de 1,06. Huit patients (24,2%) avaient des facteurs de risques. Ces facteurs de risques étaient l’hypertension artérielle (6 patients), l’obésité (1 patient) et le tabagisme (1 patient). La douleur lombaire et l’hématurie étaient les circonstances de découvertes les plus fréquentes, elles étaient présentes chez 61,5% des patients. Le délai moyen de consultation était de 8,6 mois ± 1,1 avec des extrémités de 1 et de 22 mois. L’évaluation de l’état général est résumée dans le tableau I.

Les signes généraux les plus dominants étaient l’anémie clinique et l’œdème des membres inférieurs présents chez 18 patients (54,5%). L’examen physique avait objectivé une masse lombaire chez 17 patients, 9 patients avaient un contact lombaire et l’examen était normal chez 13 patients. Tous les patients avaient une fonction rénale normale. Le taux d’hémoglobine moyen était de 10,11 g/dl avec des extrêmes de 8 et 13,2 g/dl. Nous avons retrouvé une anémie chez 14 patients (42,4 %). L’échographie était réalisée chez 28 patients et avait révélé la tumeur rénale dans 100% des cas. L’uro-TDM était réalisée chez tous nos patients. Le rein droit était le côté le plus atteint avec 17 patients (51,5 %). La dimension moyenne de la tumeur était de 12,2 cm ± 2,4 avec des extrêmes de 2 et 21 cm (Tableau II).

Le bilan d’extension avait permis de classer les patients (Tableau III).

La localisation privilégiée des métastases était pulmonaire chez 7 patients, hépatique chez 5 patients. Tous les patients ont eu une néphrectomie élargie. Nous avons enregistré un décès en peropératoire suite à des complications hémorragiques par brèche de la veine cave inférieure. Le type histologique identifié était le carcinome rénal à cellules claires chez 32 patients, un patient avait un carcinome rénal à cellule chromophobe. Le grade de Furhman était précisé que chez 7 patients, 6 avaient un grade III et 1 avait un grade II. La durée moyenne d’hospitalisation était de 5,31 jours ± 4,3 avec des extrêmes de 3 et 12 jours. Cinq patients ont présenté des complications après néphrectomie. Trois patients ont présenté une suppuration de la plaie et 2 patients une anémie ayant nécessité une transfusion. Un patient est décédé 2 jours après l’intervention. La durée moyenne de suivi était de 26,5 mois ± 3,4. La survie à 1 mois était de 90,9%, à 3 mois, elle était de 87,9% et à 1 an, elle était de 78,9%. Une progression métastatique de la maladie néoplasique est survenue chez 4 patients. Les métastases étaient au pulmonaires chez 2 patients et hépatiques chez 1 patient et une récidive locale chez 1 patient.
DISCUSSION
Le cancer du rein représente 3% des cancers, il est classé au 3ème rang des cancers urologiques après celui de la prostate et de la vessie (1). Sur une période de 5 ans 6 mois, nous avons enregistré 33 patients atteints de cancer du rein. Une étude précédente réalisée au CHUYO avait recensé 26 cancers du rein (6). Une faible incidence est également notée par d’autres études en Afrique de l’Ouest. Au Togo, Tengue et al (7) avaient enregistré 32 patients sur une période de 5 ans. Au Sénégal, Ndiath et al (5) avaient colligé 57 patients sur une période de 5 ans. Ces faibles incidences peuvent s’expliquer par l’accessibilité difficile aux moyens d’imagerie dans nos pays vu le bas niveau socio-économique de nos patients. Ce travail révèle que le cancer du rein survient chez l’adulte au Burkina Faso avec un âge moyen de 52,6 ans. Nos résultats se rapprochent de ceux de Kirakoya et al (6) au Burkina, de Ouattara et al (8) au Bénin, qui ont rapporté respectivement un âge moyen de 53,9 et 53,21 ans. Par contre, des études réalisées au Maroc (9) et en France (3), révèlent que les patients avaient un âge beaucoup plus avancé, respectivement de 62 et 65 ans en moyenne. Cette différence pourrait s’expliquer par une augmentation de l’espérance de vie en Europe. La prédominance des cancers de rein était masculine dans notre étude avec un sex-ratio de 1,06. Plusieurs études notent une prédominance nette du sexe masculin bien que le sexe ne soit pas un facteur de risque formellement identifié. La douleur lombaire et l’hématurie sont les manifestations cliniques les plus fréquentes. Nous avons un cas de découverte fortuite sur les 33 patients. Malgré les progrès de l’imagerie, le profil clinique n’a pas changé par rapport à l’étude réalisé en 2008 à Yalgado (6). Ces résultats diffèrent des études européennes, en effet depuis l’amélioration et la généralisation des moyens d’imagerie, le cancer du rein est découvert fortuitement chez plus de 70% des patients (10). La triade classique (hématurie macroscopique, lombalgie et masse du flanc) ne représente plus que 10% des modes de révélation, et ce depuis plusieurs années (10). Cette grande disparité entre ces données et les nôtres peut être expliquée par l’accessibilité difficile aux moyens d’imagerie dans notre contexte vu le bas niveau socio-économique de nos patients. En effet, il s’agit plus d’un obstacle financier que de la disponibilité des moyens d’imagerie dans la mesure où on note ces dernières années une amélioration des moyens diagnostiques dans notre pays. Nous avons constaté un délai moyen relativement long de consultation, plus de la moitié des patients avaient une symptomatologie évoluant au moins depuis une année avant la première consultation. Les formes localement avancées et métastasées sont les plus fréquentes et sont liées au retard de consultation. Plusieurs séries africaines (4–6) notent un retard de consultation. Ceci peut s’expliquer par le faible niveau éducatif et le manque de sensibilisation qui font que les populations ne consultent que lorsque les manifestations cliniques deviennent patentes dans la mesure où les signes d’alerte précoces ne sont pas détectés ou pas considérés. Par ailleurs, d’autres facteurs sont également en cause notamment la pauvreté, le manque de structures sanitaires spécialisées et leur éloignement lorsqu’elles existent, l’absence de couverture sociale, l’importance que revêt la médecine traditionnelle dans nos régions qui est parfois cause de retard de consultation dans une structure de santé. Le rein droit était le côté le plus fréquemment atteint avec 17 patients concernés soit 51,5% de nos patients. Ndiath et al (5) rapporte une prédominance du côté gauche. Cependant, aucune explication dans la littérature n’a pu être donnée pour justifier cette prédominance (5). Tous les patients de notre étude ont eu une néphrectomie. Ces résultats concordent avec ceux de l’étude précédente où tous les patients opérés avaient subi une néphrectomie élargie (6). La néphrectomie élargie est indiquée aussi bien dans un but de traitement radical que dans le cadre d’une cyto-réduction tumorale. Aucun patient n’a bénéficié d’un traitement anti-angiogénique . Ces traitements devraient être intégré dans la prise en charge de nos patients à cause du nombre élevé des cancers avancés que nous recevons. L’absence de ce traitement est liée au coût élevé qui va bien au-delà des capacités financières de nos patients. Aucun patient n’a eu une néphrectomie partielle alors que cette indication aurait pu se discuter chez les 12 patients dont le grand axe de la tumeur n’excédait pas 4 cm. Cet usage limité d’un traitement conservateur a été également observé par Benjelloun et al (9), tous les patients de l’étude ayant subi une néphrectomie élargie bien que 24% des patients soient classés T1. La prise en charge du cancer du rein a évolué dans le temps, de la néphrectomie élargie à la néphrectomie partielle par voie ouverte, laparoscopique ou robot-assistée. En dehors de la néphrectomie partielle, certains traitements ablatifs (cryoablation et ablation par radiofréquence) qui ne sont pas encore disponibles dans notre pays font actuellement partie intégrante de l’arsenal thérapeutique utilisé pour les cancers du rein dans les pays occidentaux. Leur intérêt est représenté par leur caractère mini-invasif, l’épargne néphronique et leurs complications moins fréquentes que le traitement chirurgical (11). Sur le plan histologique, la prédominance de carcinome rénal à cellules claires que nous avons notée est également rapportée par Ndiath et al (5) et Harir et al (12).
CONCLUSION
Le cancer du rein est une pathologie rare, il survient chez l’adulte autour de la cinquantaine. Les patients consultent tardivement et les formes localement avancées et métastasées sont les plus fréquentes. Le type histologique est dominé par le carcinome rénal à cellules claires.
CONFLITS D’INTERET : Les auteurs n’ont déclaré aucun conflit d’intérêts.
REFERENCES
- Capitanio U, Bensalah K, Bex A, Boorjian SA, Bray F, Coleman J, et al. Epidemiology of Renal Cell Carcinoma. European Urology. 2019 Jan;75(1):74–84. DOI: 10.1016/j.eururo.2018.08.036
- Siegel RL, Miller KD, Jemal A. Cancer statistics, 2018: Cancer Statistics, 2018. CA: A Cancer Journal for Clinicians. 2018 Jan;68(1):7–30. DOI: 10.3322/caac.21442
- Levi F, Ferlay J, Galeone C, Lucchini F, Negri E, Boyle P, et al. The changing pattern of kidney cancer incidence and mortality in Europe: CHANGING PATTERN OF KIDNEY CANCER INCIDENCE AND MORTALITY IN EUROPE. BJU International. 2008 Apr;101(8):949–58. DOI: 10.1111/j.1464-410X.2008.07451.x
- Fall B, Diao B, Sow Y, Sarr A, Thiam A, Fall PA, et al. Le cancer du rein de l’adulte au Sénégal : aspects épidémiologiques et cliniques actuels et évolution du profil sur les deux dernières décennies. Progrès en Urologie. 2011 Sep;21(8):521–6. DOI: 10.1016/j.purol.2011.02.013
- Ndiath A, Ndiaye M, Sow O, Diaw EHM, Dabo O, Sine B, et al. Cancer du rein de l’adulte à l’Hôpital Aristide Le Dantec de Dakar : aspects épidémiologiques, cliniques, histo-pathologiques, thérapeutiques et évolutifs. Annales Africaines de Médecine. 2020 Dec;14(1):e3997–4003.
- Kirakoya B, Ouedraogo A, Simpore M, Kabore F. Epidémiologie des cancers urologiques au centre hospitalier universitaire Yalgado Ouedraogo (Burkina Faso). Journal Africains des Cas Cliniques et Revues. 2020;4(1):165–70.
- Tengue K, Kpatcha TM, Botcho G, Leloua E, Amavi AK, Sikpa K, et al. Profil épidémiologique, diagnostique, thérapeutique et évolutif du cancer de la prostate au Togo. African Journal of Urology. 2016 Jun;22(2):76–82.
- Ouattara A, Hodonou R, Avakoudjo J, Cisse D, Zango B, Gandaho I, et al. Épidémiologie des cancers urologiques au Centre national hospitalier universitaire Hubert Koutoukou Maga Cotonou, Bénin. Analyse d’une série hospitalière de 158 cas. Progrès en Urologie. 2012 Apr;22(5):261–5. DOI: 10.1016/j.purol.2011.12.003
- Benjelloun M, Nouri A, Ghannam Y, Karmouni T, El Khader K, Koutani A, et al. Le cancer du rein chez l’adulte. Etude rétrospective à propos de 155 cas. African Journal of Urology. 2009;15(4):268–77.
- Pantuck AJ, Zisman A, Belldegrun AS. The changing natural history of renal cell carcinoma. J Urol. 2001 Nov;166(5):1611–23.
- Bensalah K, Bigot P, Albiges L, Bernhard JC, Bodin T, Boissier R, et al. Recommandations françaises du Comité de cancérologie de l’AFU – actualisation 2020–2022 : prise en charge du cancer du rein. Progrès en Urologie. 2020;30(s12):S2–51.
- Harir N, Zeggai S, Sabri HL, Mehani Z, Tou A. Caractéristiques épidémiologiques, cliniques, histo-pathologiques et thérapeutiques du Cancer du rein dans l’Ouest Algérien: à propos de 115 cas. African Journal of Urology. 2016 Dec;22(4):249–52. DOI: 10.1016/j.afju.2016.03.011